Sébastien Németh : Vous étiez en retrait depuis le début de la transition, qu'est-ce qui vous a convaincu de l'intégrer finalement ?
Alexandre Barro Chambrier : J'ai pu voir l'importance des réalisations. Nous étions déjà partie prenante au niveau parlementaire. C'est la suite logique. Nous sommes au Gouvernement pour apporter notre expertise. L'orientation qui est donnée par le président va dans le bon sens. Nous avons vingt mois pour atteindre les objectifs qui ont été assignés.
S.N. Est-ce que c'est le fait d'obtenir un poste très élevé dans la hiérarchie qui vous a fait prendre cette décision ?
ABC : Non, vous savez, j'ai déjà eu le privilège de servir le pays. La question qui se pose, c'est d'être en capacité à remettre le Gabon en ordre de marche.
S.N : Pourquoi acceptez-vous d'entrer dans la transition alors qu'il y aura bientôt un dialogue national ? N'avez-vous pas peur de perdre votre liberté de ton au dialogue ?
ABC : Je suis un homme libre, attaché à la liberté de penser. Ce qui me guide est d'être précédé par la nécessité d'apporter des solutions pour notre pays.
S.N : Vous héritez du ministère de la Planification, dissout sous Ali Bongo, alors que dans le passé, c'était un ministère pilier, tous les grands projets étaient validés par la planification. C'est comme ça que vous imaginez ce ministère aujourd'hui ?
ABC : Oui, ce ministère doit reprendre la place qu'il n'aurait jamais dû perdre. Celle d'avoir la vision à moyen et long terme du pays, de rompre avec l'improvisation et de compléter le dispositif de bonne gouvernance.
S. N : Concernant votre avenir politique, la Charte de la transition dit que les membres du Gouvernement ne peuvent pas se présenter. En y entrant, est-ce que vous mettez fin à vos ambitions à la présidentielle ?
ABC : Il est plus important pour moi de me concentrer sur la tâche assignée. Nous allons aller au dialogue national, nous verrons lorsque ce questions se poseront.
S.N : En septembre, vous disiez sur RFI que la Charte de la transition devait être modifiée, notamment concernant les futurs candidats à la présidentielle, parce que les ministres, sénateurs, députés ne peuvent pas se porter candidat. Vous maintenez ce besoin de modification ?
ABC : Je n'ai jamais parlé de ça. La charte de la transition, a été conçue telle qu'elle a été conçue. Au niveau du dialogue, nous verrons quel sera le champ de ce dialogue. Je suis quelqu'un de claire, je n'ai jamais parlé de changer la Charte. C'est un autre interlocuteur.
S.N : Maintenant que vous êtes au Gouvernement, comptez-vous abandonner la présidence de votre partie ?
ABC : Il est évident que je dois me concentrer sur ma tâche. Mais vous imaginez bien que je ne serai pas très loin.
S. N : Aujourd'hui, la personnalité du président Oligui Nguema est partout. Il y a des panneaux publicitaires dans les rues, les médias publics chantent ses louanges, des hauts responsables l'ont même décrit comme un Messi. Ne craignez vous pas que l'on tombe un peu dans le culte de la personnalité ?
ABC : On revient tellement de loin. C'est l'expression libre des populations. Il est probable qu'on rentrera dans une normalité. Mais il y a une nouvelle espérance. Nous n'avons pas la culture de la déification, c'est un respect mutuel qui nous anime vis à vis de nos militaires qui ont eu le courage de mettre un terme à une situation. La page est tournée. On passe à autre chose.
S. N : Justement, ces militaires, est-ce que à la fin de la transition, vous leur demanderez qu'ils retournent dans leurs casernes et rendent le pouvoir ?
ABC : Nous avons encore vingt mois. Le moment venu, nous apprécierons.
Source : RFI